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La nouvelle précarité

par Maxime Verdin

06 17, 2016 | dans Finance publique, Non classé, Politiques publiques | 0 Commentaires

Les sciences sociales ont défini la précarité comme l’état de forte incertitude de récupérer ou de conserver une situation correcte à l’avenir, pour un individu. L’Etat français précise un peu cette définition trop large en nommant précarité toute « absence d’une ou plusieurs des sécurités permettant aux personnes et aux familles d’assumer leurs responsabilités élémentaires et de jouir de leurs droits fondamentaux ». Elle peut conduire à la pauvreté, à l’insécurité, ou encore la marginalisation sociale.

Un phénomène jeune mais important

Les derniers chiffres de l’INSEE, en 2015, établissaient le nombre de salariés précaires en France à plus de 3 millions de personnes, soit un peu plus de 13% du nombre total de salariés, qui s’élève à 23 millions. C’est donc un phénomène dont l’importance implique qu’il faille être en mesure d’en comprendre les dynamiques. L’une d’entre elles occupe un nombre de plus en plus importants de recherches : la nouvelle précarité.

La nouvelle précarité est distincte de la précarité issue des milieux populaires en ce qu’elle concerne les métiers intellectuels, qui choisissent cet état pour gagner en autonomie. Le sociologue Patrick Cingolani établit cette distinction dans son livre, Révolutions Précaires, et explique que ces nouveaux précaires « aspirent à trouver dans le travail un place pour la créativité et l’expressivité ». Cela implique ce qu’il nomme un « sous-salariat chronique », résultat de modes de vie qui ne plaisent plus, puisque trop standardisés. La particularité de cette nouvelle précarité se trouve donc dans la dynamique du choix ; il est aujourd’hui possible de se revendiquer précaire, dans une perspective méliorative.

La perspective de nouvelles inégalités

Outre ce constat, la conséquence à retenir est la suivante : la nouvelle précarité créé de nouvelles inégalités, entre les précaires eux-mêmes. En effet, les conditions de vie des précaires issus des classes populaires sont largement inférieures aux conditions de vie des précaires issus des classes moyennes intellectuelles. Les seconds sont beaucoup plus appuyés par leur patrimoine, ou par des aides familiales, tandis que les premiers sont plus simplement exposés aux conditions qui qualifient aujourd’hui la pauvreté (niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté estimé en moyenne à 900 euros mensuels).

La nouvelle précarité étant un phénomène qui dépasse les logiques économiques et qui correspond plus volontiers à des dynamiques philosophiques et sociologiques – puisqu’elle est motivée par la conviction qu’il faut éviter de faire partie du système standardisé –, l’objectif ne doit pas être de l’éviter. Il faut cependant prendre en compte son existence et la mesurer exactement pour être à même de bien distinguer la précarité subie de la précarité choisie. Car l’une et l’autre n’ont pas les mêmes caractéristiques, ce qui implique que les solutions à apporter ne sont pas les mêmes. Il ne faut pas exercer une seule et même politique pour ces deux types de précarité, mais bel et bien les distinguer.

La nécessité d’une approche exacte des nouveaux précaires par les collectivités locales

Pour cela, il convient pour les collectivités locales de mener les enquêtes appropriées pour évaluer de la manière la plus juste possible le taux de nouvelle précarité. Il s’agira ensuite d’ajuster les politiques pour qu’elles épousent s’adaptent au nombre de précaires qui subissent leur situation. Savoir évaluer le nombre exact, c’est en fait une façon de permettre des dépenses éventuellement plus importantes pour les individus concernés. L’idée n’est pas de dire que les nouveaux précaires méritent des aides moins importantes que ceux qu’on pourrait appeler les « vrais » précaires. Simplement, les inégalités entre les deux jouent en défaveur des seconds, qui doivent alors être la priorité. L’objectif n’est donc pas de dépenser moins, mais de dépenser autant de façon plus ciblée.

Des études précises, s’il le faut au cas par cas, par l’intermédiaire de questionnaires adressés aux populations locales, sont donc nécessaires à l’établissement d’une politique juste et efficace, qui permette en outre d’optimiser les dépenses publiques.

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