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Le CESE et les politiques publiques : un couple bien ajusté ?

par Maxime Thuriot

05 09, 2016 | dans Non classé | 0 Commentaires

Le 16 février 2016, Manuel VALLS décide de saisir le Conseil économique, social et environnemental pour que ce dernier élabore un rapport sur « le développement de la culture du dialogue social ». Souvent désignée comme la troisième assemblée dans la sphère politique, le CESE semble pourtant être une institution récente, mystérieuse et pourtant, bon nombre de responsables et de spécialistes ne se privent pas pour souligner son inefficacité. Alors qu’il vient d’être saisi, le CESE est-il véritablement utile à la société civile ? Quelles prérogatives se cachent derrière cet acronyme ? Et surtout, quel rôle peut-il avoir vis-à-vis des politiques publiques ? A3e s’est donc penché sur ces questions pour tenter d’éclairer cette institution.

Si certains ont découvert et découvrent le CESE aujourd’hui, les racines de ce conseil n’en restent pas moins profondément ancrées dans la vie politique française. Il faut en effet remonter à la période du cartel des gauches pour que soit créé en 1924 le Conseil national économique sous l’initiative entre autres de Léon JOUHAUX et du président du Conseil de l’époque : Edouard HERRIOT. Supprimé lors du régime de Vichy, la Cinquième République modernise l’institution qui devient désormais le Conseil économique et Social. Même si l’institution déménage au palais d’Iéna et voit son nombre de membre passer de 47 conseillers à 146, son rôle reste toujours le même. Les conseillers peuvent examiner des projets et propositions de lois, dans un cadre uniquement consultatif. Il faut enfin attendre 2008 pour que la troisième assemblée de la République soit réformée par le nom d’abord, en devenant le Conseil économique, social et environnemental, et enfin par le nombre de sièges qui s’élève aujourd’hui à 233.

A défaut de vouloir refaire l’histoire de cette institution, il convient en effet de rappeler que depuis plus de 60 ans, le CESE est loin de faire l’unanimité. C’est par ailleurs ce dernier qui a provoqué indirectement la mort politique du Général de Gaulle qui démissionna le 28 Avril 1969 après la réponse négative des français au referendum qui portait, certes sur la transformation des régions, mais également sur la réforme du Sénat dont le but était de fusionner avec le CESE. Nous constatons comme vous que ce Conseil a donc traversé les époques et les sociétés, et que les critiques la concernant ne sont pas apparues il y a dix ans. Néanmoins, à quoi ressemble véritablement le CESE aujourd’hui ? En quoi sa perception a-t-elle évolué ?

Engagé pour les politiques publiques innovantes et efficaces, A3e a donc découvert quelques points noirs qui se glissent dans les rouages de cette institution. S’il faisait déjà consensus sous les régimes politiques antérieurs, le CESE doit dorénavant faire face à des problèmes d’ordre interne, mais également vis-vis du système de nos institutions. Premièrement en ce qui concerne le mode de désignation. Le CESE est actuellement composé de 140 membres censés représenter le monde professionnel, de l’entreprise, les salariés, des artisans, exploitants, et professions libérales. Ajoutons ensuite les 60 membres qui siègent en tant que représentants de la sphère sociale et du monde associatif, puis les 33 derniers au titre de la protection de la nature et de l’environnement. Si la composition donne au premier abord une vision parfaite de la représentation des acteurs publics et de la démocratie, c’est parce qu’il faut regarder les chiffres de plus près. En effet, sur les 233 membres, 61 sont désignés par le gouvernement via des décrets pris en conseil des ministres. Autrement dit, c’est presque le tiers de cette assemblée censée représenter l’ensemble des acteurs des politiques publiques et de la société civile qui est en réalité désignée par le gouvernement au pouvoir. Or, les acteurs de la vie publique n’évoluent pas forcément à la même vitesse que celle des ministères. Par ailleurs, ces désignations ne font que renforcer l’idée que le CESE est une sorte d’institution de secours pour certains politiciens ayant perdu leurs mandats.

Parallèlement à ce problème de désignation des membres, l’ajustement de cette institution par rapport aux politiques publiques demeure limité. Le CESE et ses membres possèdent en effet une responsabilité en tant que conseillers rémunérés. Ils doivent donner un avis sur une proposition de loi, un projet, ordonnances ou décrets, soit lorsqu’ils sont saisis par le gouvernement ou les présidents des chambres parlementaires (Assemblée Nationale et Sénat), soit lorsqu’il se saisi lui-même, ou bien enfin lorsqu’il est saisi par voie de pétition citoyenne qui dépasserait les 500 000 signatures. Or, le nombre de ces pétitions citoyennes n’est pas assez significatif pour que l’on puisse vraiment parler d’action de la société civile sur les politiques publiques.

Affirmer cependant que le CESE est inutile serait d’après nous une erreur. Plutôt que de se demander si la suppression du Conseil économique, social et environnemental serait pertinente, plutôt que de réfléchir à une fusion avec le Sénat, peut-être faudrait-il se pencher véritablement sur une restructuration globale de ce Conseil. Car le CESE a révélé son utilité par le passé, notamment dans la première moitié du 20ème siècle. L’ajustement pourrait donc se faire au niveau du système, en débattant à propos du mode de désignation, mais aussi et surtout par rapport au nombre considérables d’instances et d’organisations qui sont consultées par les instances publiques sur tel et tel domaine. Malgré le fait que le CESE perde sa place quant aux multiples rapports qui noient les potentielles avancées en matière de politiques publiques, il prouve cependant sa volonté de débattre au regard des nombreux travaux en cours, sur les conséquences juridiques de la COP 21, sur l’investissement dans les conditions de travail ou encore sur la culture des évaluations de politiques publiques (cf. le Rapport de M. Nasser MANSOURI-GUILANI dont le lien se trouve plus bas).

Le nouveau président de CESE élu le 1er décembre 2015, Patrick BERNASCONI se doit donc de faire face à ces défis d’une ampleur conséquente, pour que cette troisième assemblée de la République ne soit pas pointée du doigt comme le repère des personnalités politiques ayant perdu leurs mandats, pour être finalement reconnue comme un renfort envers la progression des politiques publiques.

Face à ces constats, A3e se questionne mais surtout se positionne. Nous ne nous plaçons pas dans une logique de contestation face à cette institution, bien au contraire, nous souhaitons qu’elle trouve des solutions pour s’améliorer et collaborer avec elle dans le cadre des politiques publiques. Loin d’avoir la prétention de savoir comment la réformer, nous lançons néanmoins quelques pistes de réflexion qui pourraient peut-être avoir des conséquences en terme de politiques publiques. La première est une sorte d’appel à la consultation des acteurs publics via des organisations compétentes. Est-ce que les sièges du CESE et les nominations répondent à cette interrogation ? Certes, mais dans ce cas nous nous demandons pourquoi il existe une si grande part d’hommes et de femmes siégeant au sein de CESE sur proposition du gouvernement. S’ils souhaitent être entendus, et si les pouvoirs publics attendent une coopération, le manque de représentativité s’avère être un problème capital. Enfin, quant à la culture de l’évaluation des politiques publiques, les derniers travaux semblent être un premier pas dans l’accès facilité et la simplification des procédures, mais qui doivent être selon nous renforcés par davantage d’actions, de prises de risques calculées et évaluées dans le sens du véritable intérêt général ; le seul objectif à même de renforcer l’efficacité et la confiance entre les partenaires sociaux et économiques.

Source : http://www.lecese.fr/sites/default/files/pdf/Rapports/2015/2015_22_politiques_publiques.pdf

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